Au fur et à mesure de mes romans sur l’Égypte, s’élabore une vision d’ensemble de cette civilisation, depuis ses origines, décrites dans Et l’Égypte s’éveille (XO) jusqu’à son ultime souffle, évoqué dans Pour l’amour de Philae (Grasset). Je n’avais pas encore abordé une période tourmentée, mais passionnante, l’époque dite « ptolémaïque », pendant laquelle les descendants d’Alexandre le Grand, les Ptolémées (333-30 av. J.-C.) gouvernèrent l’Égypte.
Cléopâtre, septième du nom, est la dernière représentante de cette lignée et la plus étonnante. Loin de se contenter d’une existence luxueuse à Alexandrie, elle conçoit le projet insensé de redonner vie et puissance à une Égypte où s’édifient encore des temples gigantesques, financés par l’administration grecque en échange de la paix civile.
Cléopâtre s’affirmera comme le dernier des pharaons, elle, la Grecque devenue Égyptienne. Et son extraordinaire trajectoire a traversé les siècles ; ne fut-elle pas à la fois aventurière, chef d’État, chef de guerre, intellectuelle à la vaste culture et amoureuse passionnée ?
Le roman commence lorsque Cléopâtre a vingt ans. Elle est déjà reine d’Égypte, et la situation à laquelle elle est confrontée dans son propre royaume est des plus sombre… Racontez-nous la vie tourmentée de cette toute jeune femme.
Cléopâtre est la fille de Ptolémée XII, dit « le flûtiste », souverain débauché et corrompu qui s’était maintenu au pouvoir grâce à l’aide militaire et financière de Rome. À sa mort, son testament prit force de loi : lui succédera un couple royal formé de Cléopâtre et de son petit frère de 14 ans, Ptolémée le Treizième, gamin insupportable qui déteste sa sœur aînée.
Cléopâtre se heurte à un conseil de régence, formé de « trois valets devenus ministres ». Elle tente de les évincer et d’imposer d’indispensables réformes monétaires, au sein d’un pays riche, mais en crise.
C’est l’échec.
Cléopâtre doit s’enfuir, et beaucoup la croient condamnée à un exil définitif. Alors débute l’impossible reconquête d’Alexandrie et du pouvoir, au péril de sa vie. À la tête d’une cohorte de mercenaires qu’elle doit commander d’une poigne de fer, elle est résolue à combattre.
Dans ce nouveau roman, vous abordez l’une des plus grandes, sinon la plus grande histoire d’amour du monde : celle qui lia Cléopâtre à César. Pouvez-vous nous présenter le général romain lorsqu’il croise la route de Cléopâtre ?
Âgé de 52 ans, César, le vainqueur de la guerre des Gaules, terrasse à Pharsale l’armée de soin rival, Pompée. Rome, angoissée, attend l’issue de l’interminable conflit entre les deux hommes. Pompée réussit à s’enfuir, espérant trouver refuge en Égypte, y lever des troupes et poursuivre le combat.
César n’est pas qu’un général, un imperator qui a droit de vie et de mort sur ses soldats, lesquels lui vouent un véritable culte ; c’est aussi un lettré et un homme d’État qui veut faire de Rome la première puissance mondiale.
Au risque de tout perdre, il décide de poursuivre Pompée et de lui briser définitivement les reins ; Pompée, l’exécuteur testamentaire du défunt Ptolémée XII, qui pourrait prendre la tête de l’armée égyptienne et anéantir le modeste corps expéditionnaire de César.
Pourtant, attirée par le pays mythique des pharaons, persuadé que son destin va se jouer là, César, fils de Vénus, se lance dans une aventure à hauts risques ; Alexandrie pourrait être le tombeau du conquérant des conquérants.
Au fil des pages ce n’est plus seulement Cléopâtre que nous suivons, mais le couple qu’elle forme avec César. En quoi la rencontre de ces deux « géants » va-t-elle influencer l’avenir de l’Égypte et du monde ?
L’Égypte est la grande puissance orientale, Rome la grande puissance occidentale ; mais les deux pays sont en proie à une crise grave, à la fois politique et économique.
Deux personnages d’exception, César et Cléopâtre, vont s’identifier à leur pays respectif et leur redonner un nouveau souffle ; encore leur faut-il éliminer leurs ennemis et trouver un terrain d’entente.
Sans César, Cléopâtre n’aurait pu reconquérir l’Égypte ; sans Cléopâtre, César n’aurait pu obtenir une paix durable en Orient.
Lui va pouvoir partir à la conquête de Rome, elle ressusciter l’empire des pharaons, sans qu’un conflit ne contrarie leurs ambitions. Et César devient le père de Césarion, futur pharaon d’Égypte !
À leur histoire d’amour, tellement improbable, se superpose donc une nouvelle réalité politique qui met fin à des années de conflits et de crises. Orient et Occident s’allient, et la prospérité revient.
La magie, le surnaturel sont encore une fois très présents dans ce livre, au travers de plusieurs figures : Hermès, le Vieux et son âne, Vent du Nord. Le temple de Dendera lui-même devient un personnage à part entière…
Même à Alexandrie, la nouvelle capitale de l’Égypte fondée par Alexandre le Grand, la vieille magie égyptienne est partout présente. La fameuse Bibliothèque abritait nombre d’ouvrages de magie, d’astrologie et d’alchimie que consultait Cléopâtre.
La plupart de ces textes était attribuée à Hermès, héritier du dieu Thot, patron des scribes égyptiens. C’est pourquoi Hermès joue un rôle important dans ce roman, lui qui oriente l’action de Cléopâtre et lui rappelle l’importance de l’enseignement des Anciens.
Le dernier rêve réalisé de Cléopâtre fut l’immense temple de Dendera, en Haute-Égypte, terminé sous son règne ; sur l’une de ses parois, elle y est d’ailleurs représentée, accompagnée de son fils Césarion, né de son union avec César. Ce temple, où sont dévoilés les mystères d’Osiris, est un « personnage » central ; les anciens Égyptiens ne considéraient-ils pas un sanctuaire comme un être vivant, capable de survivre aux humains ?
Quant à Vent du Nord, que mes lecteurs retrouveront, je l’espère, avec bonheur, il continue à traverser les siècles et à exercer ses facultés « surnaturelles » avec la perspicacité et la détermination des ânes !